Quand Descartes et Paul se mettent d’accord sur le service
Voici ce qu'écrit Descartes à propos du lien étroit entre l'individu et la communauté, et l'importance de prendre soin d'autrui :
"Il y a une vérité dont la connaissance me semble fort utile: qui est que, bien que chacun de nous soi une personne séparée des autres, et dont, par conséquent, les intérêts sont en quelque façon distincts de ceux du reste du monde, on doit toutefois penser qu'on ne saurait subsister seul, et qu'on est en effet, l'une des parties de l'univers, et plus particulièrement encore l'une de ces parties de la terre, l'une des parties de cet Etat, de cette société, de cette famille, à laquelle on est joint par sa demeure, par son serment, par sa naissance.(C'est beau ! Il était vraiment athée, ce Descartes ??)
Et il faut toujours préférer les intérêts du tout, dont on est partie de sa personne en particulier; toute fois avec mesure et discrétion, car on aurait tord de s'exposer à un grand mal pour procurer un petit bien à ses parents ou à son pays; et si un homme vaut plus, lui seul, que tout le reste de sa ville, il n'aurait pas besoin de se perdre pour la sauver.
Mais si on rapportait tout à soi-même, on ne craindrait pas de nuire beaucoup aux autres hommes, lorsqu'on croirait en retirer quelque petite commodité et on n'aurait aucune vraie amitié, ni aucune fidélité, ni généralement aucune vertu ; au lieu qu'en se considérant comme une partie du public, on prend plaisir à faire du bien à tout le monde, et même on ne craint pas d'exposer sa vie pour le service d'autrui, lorsque l'occasion s'en présente; voire on voudrait perdre son âme, s'il se pouvait, pour sauver les autres."
(Descartes, Lettre à Elisabeth, Individu et communauté).
Belle explication de la nécessité absolue de participer à la vie communautaire de tout son être, qui plus est avec plaisir, car faire du bien à la communauté équivaut OBLIGATOIREMENT à se faire du bien à soi-même puisque nous faisons partie de la communauté !
Et pour Paul, inutile de rappeler ici 1 Corinthiens 12.
Paul y démontre au verset 26 l'interaction profonde entre la santé individuelle et la santé communautaire si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui; si un membre est honoré, tous les membres se réjouissent avec lui.
Bien sûr, Paul va plus loin dans l'explication rationnelle (tiens, un cartésien avant l'heure ?!) de cette relation indissociable dans les versets précédents. Il nous invite, v.31, à trouver les meilleurs des dons (avoir le meilleur à notre porté) pour le bénéfice de la communauté.
Et comme Paul n'a rien fait à moitié, il nous montre une voie par excellence (1 Co 12.31) : l'Amour (voir 1 Co 13).
Descartes comme Paul nous montrent ainsi que l'interdépendance primordiale de l'individu avec la communauté est LE moteur de l'action et du service.
Encore faut-il franchir la première étape que nos deux auteurs soulignent également : celle de la conscience de la valeur d'autrui (de nos frères, de nos soeurs).
Descartes nous explique que si nous pensons que notre petit être a plus de valeur que la communauté, nous finirons sans "vraie amitié", ni fidélité, ni même de vertu (vertu qui fait la valeur d'une personne à son époque). Ce qui correspond bien à notre vision chrétienne que Paul souligne en 1 Co 13 : aimer les autres, ce qui ne se fait avec force et réalité que si l'on estime l'autre.
Ainsi, tout le monde est d'accord, de Paul à Descartes en passant par moi (pas encore aussi connu !) : l'amour est la base du service.
Si on diagnostique une démotivation au service je prescris donc une cure d'amour.
Ce n'est pas en assénant des "la Bible dit qu'il faut servir" "c'est bien de participer"... qu'on obtiendra l'implication pleine et l'excellence dans le service de l'Eglise. C'est premièrement en aidant les chrétiens à rechercher et se plonger dans l'amour de Dieu, lequel a pour conséquence immédiate l'amour pour les hommes, donc l'envie de servir.
Pas besoin de verbiages sur la structure, le management ou le leadership : amener les gens à expérimenter l'amour de Dieu pour eux les amène directement au service.
Le verbiage provoque une stimulation courte, une étincelle, une tour de piste intellectuel, mais l'amour de Dieu renverse les mentalités égoïstes et égocentriques pour former des serviteurs fidèles et zélés.
Commentaires (0)