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Eglise : lieu d'accueil ou lieu d'envoi ?

Auteur :
Type : Réflexion
Thème : L'Eglise
Source : Construire Ensemble
Réf./Date source : 01/11/1999  
Publié sur Lueur le

Vous avouerez que cette question ne se pose pas en ces termes pour la plu­part d'entre nous. Comment donc remettre en question la vocation d'accueil de l'Eglise et nous placer devant cette alternative ?

En fait, c'est un prédicateur visitant notre Eglise qui n'a pas hésité à nous affirmer ceci : "on a trop souvent présenté l'Eglise comme un lieu d'accueil, en fait elle est plutôt un lieu d'envoi". J'ai eu un moment de recul, trouvant le propos provocateur, sinon peu conforme à la nature de la vocation de l'Eglise. Voilà encore un schéma réducteur qui nous présente le programme chrétien sous sa forme la plus spartiate et militante ! Et vlan pour les nouvelles recettes !...

Tant de gens ont besoin d'être aimés, consolés, compris et écoutés. S'ils ne trouvent pas cela dans l'Eglise, alors où vont-ils le trouver ? Non ! Vraiment ce frère a poussé le bouchon un peu trop loin ! me dis-je. Va-t-on appeler les chrétiens à devenir des soldats plus soucieux d'astiquer leurs fusils et vérifier leurs guêtres que de s'occu­per des blessés sur le champ de bataille ?... Ou alors chacun aurait sa propre vision de l'Eglise, selon son tempérament et son éducation. Qui sait ? A moins qu'il y ait une certaine vérité dans cette phrase.

Réfléchissons un peu

Les affirmations fortes ont le  mérite de vous forcer à réfléchir et pas seulement réagir. Alors, per­mettez-moi d'essayer de com­prendre un peu mieux avec vous. Prenons les récits bibliques. Au fond, Jésus ne s'est-il pas entouré d'une équipe de militants ? Il leur demanda de quitter leur emploi, leur famille, battre la semelle sans trop savoir ce qu'ils allaient manger et où ils allaient dormir, se mettant à dos la société... A coup sûr, Jésus a fait de son groupe de disciples une base d'envoi peu ordinaire, à tel point qu'il les envoya comme de brebis au milieu des loups (Matthieu 10:16). La suite des événements n'a fait que le confirmer. Tous les récits des Actes des Apôtres montrent une Eglise en progression constan­te : de Jérusalem à Antioche, d'An­tioche à la Syrie et à la Grèce, et au-delà. Et tout cela dans un contexte de persécution et d'insécurité.

Et pourtant, il ne faut pas négliger un autre aspect. Comment passer sous silence les exhortations de Paul de s'accueillir les uns les autres (Romains 15:7) ? Et puis cette affirmation sans nuance de Jacques : "La religion pure et sans tache, devant Dieu notre Père, consiste à visiter les orphelins et les veuves dans leurs afflictions, et à se préserver des souillures du mal" (Jacques 1:27). Il se faisait l'écho de la saine réaction des apôtres de Jérusalem qui réorganisèrent l'accueil dans l'Eglise pour prendre soin des veuves lésées (Actes 6).

Alors ? Que faut-il penser de tout cela ? Comme en bien des cas, on conclura gentiment : il faut garder l'équilibre entre les deux. Je ne sais si vous êtes comme moi, mais parfois ce mot "équilibre" m'énerve. J'ai comme l'impression qu'on cherche à plaire à tous, pour mener une vie chrétienne "bon chic, bon genre" ! Les gens équilibrés sont-ils encore capables de vivre la folie de Dieu ?

Où est la vérité ?

L'une des plus belles paraboles de Jésus est celle du Bon Samaritain. Certes, elle nous enseigne à savoir qui est notre prochain. Mais plus je la médite, plus j'y vois du mouvement : ce Samaritain est un homme mobile. C'est parce qu'il n'a pas peur de se déplacer, qu'il est capable de prendre soin de ce blessé. Les hommes religieux avaient hâte d'entrer dans le Temple : ils donnaient plus d'importance à l'institution : ils couraient vers leur lieu de culte en s'aveuglant sur les besoins autour d'eux à l'extérieur du "système".

L'Eglise, après des temps pionniers, ne se fige-t-elle pas dans ses salles, se mettant en vitesse de croisière si vitesse il y a ! - attendant la "clientèle" qui voudra bien écouter ses sermons et sa louange. Il est vrai que Dieu l'appelle à être accueillante et à vivre une qualité de relation conforme à la Parole. Mais n'a-t-on pas négligé cet accueil mobile, ce dynamisme de l'envoi qui engendre la spontanéité et les bons réflexes ? Si je puis conclure :

C'est dans le mouvement qu'il y a obéissance. Dieu nous dit "allez par tout le monde..." (Marc 16:15) et plus loin, il promet ceci : "voici les miracles qui accompagneront ceux qui ont cru en mon Nom..." (Marc 16:17). Quand l'Eglise va et proclame, Dieu l'accompagne, et c'est là même qu'elle voit les signes du Royaume. C'est là que Dieu l'appelle à accueillir les souffrants. C'est à coup sûr le meilleur lieu d'apprentissage pour l'accueil et le secours aux blessés de la vie. Au fond, nous sommes appelés à faire de l'accueil "ambulant" si je peux m'exprimer ainsi. Ne sommes-nous pas en fait "étrangers et voyageurs sur la terre" ? Alors décollons de nos bancs d'églises pour aller au-devant de ceux qui cherchent et qui souffrent.

La vérité n'est ni entre les deux ni dans l'équilibre ; l'un ne va pas sans l'autre.

Dans votre prière ce soir, dites : "Seigneur, envoie-moi !"... Il va vous réserver des surprises !

Un grand merci à ce prédicateur : il nous a provoqués, mais il valait la peine de réfléchir.

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