La Quête du bonheur
4. Méditations sur le bonheur
Type : Dossier
Thème : Questions de Société
Source : Construire Ensemble
Réf./Date source : 03-2002
Publié sur Lueur le
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La joie parfaite
Un jour, François d'Assise appela frère Léon et dit : Frère Léon, écris quelle est la vraie joie.
Un messager vient et dit que tous les maîtres en théologie de Paris sont rentrés dans notre Ordre ; écris : ce n'est pas la vraie joie.
De même, tous les prélats d'outre-monts, archevêques et évêques ; de même le roi de France et le roi d'Angleterre ; écris : ce n'est pas la vraie joie.
De même, mes frères sont allés chez les infidèles et les ont tous convertis à la foi ; de même, je tiens de Dieu une telle grâce que je guéris les malades et fais beaucoup de miracles : je te dis qu'en tout cela n'est pas la vraie joie.
Mais quelle est la vraie joie ?
Je reviens de Pérouse, et par une nuit profonde, je viens ici, et c'est un temps d'hiver, boueux et froid, au point que des pendeloques d'eau froide congelée se forment aux extrémités de ma tunique et me frappent toujours les jambes et du sang jaillit de ces blessures.
Et tout en boue et froid et glace, je viens à la porte, et, après que j'aie longtemps frappé et appelé, un frère vient et demande : Qui est-ce ? Moi je réponds : Frère François. Et lui dit : Va-t'en, ce n'est pas une heure décente pour circuler, tu n'entreras pas.
Et à celui qui insiste, il répondrait à nouveau : Va-t'en, tu n'es qu'un simple et ignare ; en tout cas, tu ne viens pas chez nous ; nous sommes tant et tels que nous n'avons pas besoin de toi.
Et moi, je me tiens à nouveau debout devant la porte, et je dis Par amour de Dieu, recueillezmoi cette nuit. Et lui répondrait je ne le ferai pas. Va à l'hospice des lépreux et demande là-bas
Je te dis que si je garde patience et ne suis pas ébranlé, qu'en cela est la vraie joie et la vraie vertu et le salut de l'âme.
François d'ASSISE
Le texte sur la joie parfaite est connu par le récit amplifié et poétique des Fioretti. Celui qui est donné ici, beaucoup plus sobre, présente toutes les garanties de l'authenticité. La vraie joie est celle qui subsiste dans le coeur de l'homme alors même qu'il se trouve dans la nuit, le froid et qu'il est rejeté par ses frères. Ce qui survient, succès ou échec, n'a pas de prise sur la source d'où jaillit la joie.
(Extrait de : Claire et François d'Assise, Écrits, Paris, Le Cerf, 1991)
La recherche du bonheur
Tous les hommes recherchent d'être heureux. Cela est sans exception, quelques différents moyens qu'ils y emploient. lis tendent tous à ce but. Ce qui fait que les uns vont à la guerre et que les autres n'y vont pas est ce même désir qui est, dans tous les deux, accompagné de différentes vues. La volonté ne fait jamais la moindre démarche que vers cet objet.
C'est le motif de toutes les actions de tous les hommes jusqu'à ceux qui vont se pendre. Et cependant depuis un si grand nombre d'années, jamais personne, sans la foi, n'est arrivé à ce point où tous visent continuellement. Tous se plaignent, princes, sujets, nobles, roturiers, vieux, jeunes, forts, faibles, savants, ignorants, sains, malades de tous pays, de tous les temps, de tous les âges, de toutes les conditions.
Une épreuve si longue, si continuelle et si uniforme devrait bien nous convaincre de notre impuissance d'arriver au bien par nos efforts. Mais l'exemple nous instruit peu. Il n'est jamais si parfaitement semblable qu'il n'y ait quelque délicate différence et c'est de là que nous attendons que notre attente ne sera pas déçue en cette occasion comme en l'autre, et ainsi le présent ne nous satisfaisant jamais, l'expérience nous pipe, et de malheur en malheur nous mène jusqu'à la mort qui en est un comble éternel.
Qu'est-ce donc que nous crie cette avidité et cette impuissance, sinon qu'il y a eu autrefois dans l'homme un véritable bonheur, dont il ne lui reste maintenant que la marque et la trace toute vide et qu'il essaie inutilement de remplir de tout ce qui l'environne, recherchant des choses absentes le secours qu'il n'obtient pas des présentes, mais qui en sont toutes incapables parce que ce gouffre infini ne peut être rempli que par un objet infini et immuable, c'est-à-dire que par Dieu même.
Blaise PASCAL
Pensées 425 (Brunschvicg), 148 (La fuma)
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