Etude sur le Cantique des Cantiques
6. Cantique des Cantiques : Conclusion
Type : Enseignement
Thème : Commentaires Bible Annotée Neuchâtel
Source : Theotex
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- Cantique des Cantiques : Conclusion
Il ne nous reste plus qu'à répondre brièvement à cette double question : que penser de l'admission du Cantique dans le canon sacré ? Et quel usage l'Eglise peut-elle faire aujourd'hui de cet écrit ?
Si l'idée du poème est bien celle que nous avons dégagée, il est évident que ce livre joue un rôle important et légitime dans le recueil des documents de la révélation divine.
Echo de l'une des révolutions théocratiques les plus profondes, révolution à laquelle avait concouru et le péché de l'homme et la volonté divine, cet écrit fait la part des facteurs opposés ; il établit les vraies normes de la situation nouvelle ; il met Israël en garde contre les dangers auxquels elle l'expose ; il le prépare à son avenir.
Comment un pareil poème n'aurait-il pas le droit de prendre rang dans la collection des écrits dépositaires de la pensée de Dieu à l'égard de son oeuvre sur la terre !
L'idée centrale du Cantique une fois saisie, rien de plus aisé que d'en faire l'application pratique permanente au peuple chrétien.
Semblable à Sulamith captive dans le palais de Salomon, l'âme fidèle, tant qu'elle est renfermée dans la prison du corps, se trouve exposée à toutes les séductions du monde.
Mais en elle habite une aspiration sublime, une soif inextinguible du Dieu dont elle a ressenti l'amour, l'instinct vierge, dont a parlé saint Martin, qui la pousse vers cet invisible bien-aimé dont elle est séparée encore par les murailles de sa prison.
Elle le cherche ; elle l'appelle ; elle sait que tous les êtres terrestres ne l'aiment que pour eux-mêmes, tandis que lui, c'est pour elle, c'est purement, qu'il l'aime.
Voilà l'éclair de Jah qui l'a percée. Durant les nuits elle le cherche sur sa couche. Pendant le jour elle s'efforce de lui complaire.
Quelquefois il descend et se présente aux yeux de sa foi. Elle le voit comme en rêve ; elle savoure spirituellement sa présence ; puis soudain il disparaît.
Et la voilà de nouveau solitaire, aux prises avec Salomon, qui s'approche dans sa pompe et cherche à la fasciner.
Combien la lutte est rude, violente parfois ! Mais dans le temps même que le roi est en son divan, le nard de Sulamith, la présence invisible de son ami, exhale son parfum et la fortifie.
Elle demeure fidèle à celui qui est invisible ; elle voit approcher le moment où l'amour vrai de son Dieu ayant triomphé dans son coeur de tous les attraits séducteurs, elle sera recueillie par lui, et où, plus heureuse en ce point, que Sulamith elle-même, elle pourra le suivre sur ces montagnes parfumées où il paît son troupeau parmi les lis.
Ainsi le Cantique est encore aujourd'hui une vérité partout où un souffle de vie divine, enfermé dans la double prison terrestre du corps et du monde, aspire à la liberté et cherche dans la communion de Jéhovah, apparu en Christ, la satisfaction de ces besoins suprêmes.
Appliquer le Cantique dans ce sens, ce n'est pas allégoriser arbitrairement, mettre dans le contexte ce qui n'y est pas ; c'est faire descendre le seau au fond du puits et amener au jour l'eau vive qui y jaillit.
Goethe a appelé la Bible le livre d'éducation populaire par excellence. Elle ressemble en effet à un écrin dans lequel aurait été renfermée, sous le plus petit volume possible, la collection de tous les chefs-d'oeuvre littéraires, de tous ceux qui font le plus énergique appel aux facultés relevées de l'homme, les modèles dans chaque genre.
Dans les livres historiques nous trouvons une narration simple, naïve, impartiale, objective et en même temps dramatique, vivante, pittoresque, à laquelle n'atteint l'historiographie d'aucun peuple ancien ou moderne.
Les prophètes sont les exemples de l'éloquence à la fois la plus riche et la plus sobre, la plus tendre et la plus austère. Ces chefs-d'oeuvre d'art oratoire n'ont été surpassés à la tribune d'aucun peuple et dans la chaire d'aucune église.
Le génie lyrique n'a produit nulle part rien qui puisse se comparer aux Psaumes. Purifiant toute jouissance, sanctifiant toute douleur, plus élevés que nous quand nous sommes au faîte, plus bas que nous quand nous nous sentons au fond de l'abîme, seuls ils répondent à toutes les situations humaines et semblent toujours composés exactement en vue de la circonstance où nous nous trouvons placés. De là leur éternelle fraîcheur. Les recueils de poésie passent et se succèdent ; les Psaumes demeurent.
Le livre de Ruth nous offre la plus gracieuse et la plus pure des idylles.
Dans les Lamentations de Jérémie nous rencontrons l'élégie élevée à une hauteur d'où elle ne pourra désormais que déchoir.
Si nous cherchons le livre de la sagesse pratique le plus populaire, nous le trouverons dans les Proverbes.
Si la méditation philosophique, unie à la verve satyrique, nous attire, l'Ecclésiaste est là pour nous donner à penser plus qu'aucun autre écrit du genre.
Dans le livre de Job se déroule à nos yeux la grande épopée, celle dont le héros est l'humanité elle-même personnifiée en Job et appelée à décider de la victoire de Dieu sur Satan ou de Satan du Dieu.
Le drame seul manquait. Cette place importante semblait rester vide dans ce code littéraire, aussi bien que religieux, de l'humanité.
Le Cantique comble cette lacune. Après l'étude que nous avons faite de ce poème, ne pouvons nous pas l'envisager à bien des égards comme le bouquet de l'art dramatique, et, en considérant l'élévation du contenu, la richesse, la fraîcheur et la puissance de la forme, ratifier ce nom de Cantique des cantiques par lequel on lui a donné une place au-dessus de tous les autres produits lyrico-dramatiques, semblable à celle que la poésie elle-même occupe au dessus de la prose ?
C'est ainsi que Dieu a uni dans la Bible la beauté à la vérité et que l'on peut appliquer à ce temple-là le mot du psalmiste :
La force et la beauté, sont dans ton sanctuaire.
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