Blessures et restauration
2. Blessures et restauration : L'accompagnement
Type : Dossier
Thème : Abus et Harcèlement
Source : Aimer & Servir
Réf./Date source : 127
Publié sur Lueur le
- Prise de conscience des blessures et processus de restauration
- Blessures et restauration : L'accompagnement
- Processus de restauration
- Hymne à la vie
Je ne pourrai jamais imposer ma volonté, forcer une décision : elle appartient à l'autre. De même par rapport à cette dimension de respect de l'autre lorsque j'accompagne une personne, ma grande peur c'est qu'elle fasse quelque chose pour me faire plaisir. Il faut donc dès l'abord dire: "je suis là pour vous accompagner, vous n'êtes pas là pour me faire plaisir ; si vous ne voulez pas me répondre ou prier, ne le faites pas." Cette dimension de respect est importante pour ne pas entrer dans le travers de relations abusives comme on peut parfois en vivre dans les églises où sous couvert de la Parole ou de l'obéissance on veut forcer des gens à faire certaines choses. Il est bon qu'il y ait dans chaque église des survivants d'abus parce qu'ils ont une antenne pour repérer les personnes abusives ; leur sensibilité peut être utilisée de manière positive.
La Bible peut vraiment être utilisée comme outil pour garder quelqu'un courbé et assujetti ; il faut d'abord que cette personne guérisse pour ensuite pouvoir gérer ses limites et son temps et pouvoir dire non. Si une personne sait dire non, son oui a alors toute sa valeur. Jésus dit "que votre oui soit oui et que votre non soit non." Cela peut sous-entendre cette dimension.
Une autre attitude qu'il faudrait avoir vis à vis d'un personne comme notre "sans abri" : la curiosité ; une saine curiosité pour comprendre la personne en souffrance. Dans le milieu de la santé, nous sommes sur le champ de bataille des personnes souffrent ; c'est important d'avoir cette attitude plutôt que de tirer des conclusions hâtives.
Le fait de se dire, ou de dire au Seigneur "je ne sais pas, je désire apprendre" permet l'humilité : on n'aborde plus l'autre en tant que supérieur, mais en tant que vis à vis ; on cherche à travailler en collaboration avec et non pas malgré la personne ; on ne la traite pas comme un cas, une situation étiquetée: le schizophrène, l'alcoolique, la dépressive ; parler ainsi est une manière de prendre de la distance pour se protéger mais c'est aussi enfermer l'autre dans une prison où le dialogue n'est plus possible.
En tant que chrétiens, nous avons comme atout l'espérance pour toutes ces personnes en souffrance ; Dieu peut faire quelque chose dans leur vie.
Au travers du dialogue la personne peut nous donner des clés, des pistes pour la compréhension de sa situation, chaque personne étant unique et ayant son histoire familiale ; mettons de côté nos idées préconçues face à une situation, écoutons la personne et écoutons Dieu.
Dans nos églises, nous trouvons une multitude de blessés de la vie qui survivent, qui n'ont pas la capacité de croquer la vie à pleines dents (d'une manière positive), de recevoir des cadeaux de la vie, des compliments, de rire et de se réjouir de belles choses.
Dans le milieu médical et paramédical, du côté des soignants, le constat n'est pas plus optimiste ; le "syndrome du sauveur" est un moteur important qui pousse les soignants dans ces professions. Ces choix se font au niveau de l'inconscient ; il est bon et juste que notre regard puisse se porter sur nous mêmes. Le danger, lorsque nous sommes centrés sur l'autre, c'est d'être fermés au Saint Esprit qui peut vouloir nous parler, nous risquons de devenir alors de bons théoriciens au détriment de la compassion.
Pour pouvoir aider celui qui souffre et soi même en premier, il faut laisser le problème de la souffrance nous heurter ; pour qui veut guérir, le problème de l'injustice doit pouvoir être abordé. Comme chrétien, nous ne pouvons pas faire l'économie d'une telle démarche. Si ma vie est comme une maison encombrée de mes ténèbres, de mes peurs, de mes blessures, de mes doutes, de mes questions, je n'aurai que peu de place pour accueillir l'autre et sa souffrance ; celle ci va heurter la mienne et si je continue à passer mon temps à la mettre de côté, je ne pourrai que réagir en me fermant.
Citons quelques paroles d'Andrée Ruffo, juge pour mineurs au Canada, ("Des enfants de l'indifférence, il suffit pourtant d'un regard", Editions L'homme) "Renoncer à la vitalité de notre enfance nous amène aussi à retrouver notre souffrance d'enfant c'est un chemin difficile mais nécessaire que nombre d'adultes résistent à entreprendre ; la souffrance qui nous habite depuis l'enfance devient le mal de vivre de notre vie d'adulte, mais le fait d'entrer en contact avec ce qui nous a fait mal enfant, nous permet de nous en libérer, sinon nous demeurons prisonniers de la violence subie au fil de notre propre développement et nous nous condamnons à la rejeter, à l'imposer aux autres, dont nos enfants. Si, comme adulte, je ne veux connaître ni accepter ma peur, comment pourrais je rassurer l'enfant qui me dit la sienne ? Si je ne ressens plus la brûlure de l'humiliation comment puis je comprendre la douleur de cet enfant humilié ?"
Cette question de la souffrance est aussi liée à la question de l'injustice.
Pourquoi moi ? D'autant plus si l'on est chrétien : et Dieu dans tout cela ? Où était Il ? Pourquoi n'est Il pas intervenu ? Si Dieu est tout puissant et amour, pourquoi n'a t il rien fait pour stopper cela ? Nous n'avons que des éléments de réponse mais pas la réponse. Un des mécanismes de survie est de se détacher au maximum de ce qui est arrivé ; certains sont même emmurés. Comment joindre ces personnes tellement repliées sur elles mêmes qu'il semble impossible de les atteindre ?
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