Martin Luther King
4. La pertinence du message de Martin Luther King pour aujourd'hui
Type : Dossier
Thème : Personnalités protestantes
Source : Construire Ensemble
Réf./Date source : 04-1998
Publié sur Lueur le
- Martin Luther King
- Quand la justice et la paix s'embrassent...
- La Foi agissante de Martin Luther King
- La pertinence du message de Martin Luther King pour aujourd'hui
- Extrait d'un sermon de Martin Luther King
30 janvier 1956
Le boycott des bus, de Montgomery dure depuis deux mois et des blancs qui défendent le système de ségrégation (ou d'apartheid, si vous préférez) décident de s'en prendre au jeune leader du mouvement. Alors ils vont à la maison de Martin Luther King et lancent une bombe. L'explosion détruit la véranda mais Coretta King et leur bébé sont indemnes. Martin Luther King, qui animait une réunion en ville, accourt comme un fou dès qu'il apprend la nouvelle. Une foule, dont plusieurs personnes en armes, se forme autour de sa maison, criant à la vengeance.
Que feriez-vous dans une telle situation ? Votre maison est sérieusement endommagée, votre femme et votre enfant auraient pu y laisser leur vie, et des hommes armés n'attendent que votre signal pour aller se venger. Que feriez-vous?
Prenant la parole, King s'adresse à la foule: "Pas de panique. N'utilisez pas vos armes. Tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée. Nous ne pouvons pas résoudre ce problème par le recours à la violence. A la violence, on doit répondre par une non-violence active."
Et, plus étonnant encore , il ajoute "Je vous demande d'aimer vos ennemis ..."
La non-violence, actualité de l'Evangile
La pertinence du message de Martin Luther King aujourd'hui, c'est, me semble-t-il, qu'il nous montre l'à-propos de l'Evangile de Jésus-Christ dans la vie de tous les jours. Il nous montre comment faire face aux forces du mal et comment oeuvrer pour la justice, la paix et la fraternité. Il nous montre comment aimer nos ennemis.
Nous sommes mandatés par Dieu pour résister au mal, nous dit King (cf. Rm 12.14,17-21). La non violence qu'il prône n'est pas une non résistance au mal, mais c'est bien une résistance non violente, un effort de "vaincre le mal par le bien". Pour King, c'est Christ qui donne l'esprit et la motivation, et Gandhi la méthode. Et il explique cette approche de la non-violence active en six points :
1. Ce n'est pas une méthode pour les lâches mais pour les forts elle implique qualité spirituelle et courage personnel.
2. Elle ne cherche pas à humilier l'adversaire mais à gagner son amitié et sa compréhension. Convaincre et non vaincre. Le but est toujours la réconciliation.
3. Elle attaque les forces du mal plutôt que les personnes qui commettent le mal. De même, la victoire sera celle de la justice et de l'amour, non celle de telle ou telle personne.
4. Elle implique l'acceptation de la souffrance sans désir de vengeance. Le sacrifice de soi est la meilleure preuve d'une volonté de service de l'humanité.
5. Elle évite non seulement la violence extérieure du corps mais aussi la violence intérieure de l'esprit. La norme de l'agir chrétien est l'amour.
6. Elle se fonde sur la conviction que l'univers est à la recherche d'une harmonie morale qui sera faite de justice et de liberté, Dieu lui-même est aux côtés de ceux qui luttent pour cette justice et cette liberté.
C'est ainsi que King est toujours soucieux d'employer des moyens adaptés à la fin poursuivie. Pour beaucoup de gens, la fin justifie les moyens, mais pas pour King (ni pour l'éthique chrétienne). On ne peut atteindre des buts justes par des moyens injustes ou mauvais, démontre-t-il. En effet, les moyens représentent la semence et la fin représente l'arbre. Ce qui donne un sens à notre résistance et à notre non-violence active, c'est le but final de la réconciliation et de la fraternité.
Si King et son mouvement (qui au fond, était l'aile radicale de l'Eglise noire américaine) ont embrassé ces principes de la résistance non violente, c'est qu'ils y ont trouvé un instrument efficace de l'amour et de la justice.
"La non violence est plus qu'une technique passagère, plus qu'un moyen d'action, c'est une manière de vivre, c'est une foi", dit-il à Paris en 1965.
La justice, ou l'amour en acte
Pour King , la justice est l'amour en acte, l'amour corrigeant tout ce qui s'oppose à l'amour. Il a donc passé sa vie active tout entière à oeuvrer pour la justice. Il fallait en finir avec l'oppression dans le pays de la liberté. Il fallait en finir avec la ségrégation et le racisme dans un pays fondé sur les droits de l'homme.
C'est pourquoi non seulement des boycotts, des marches et des "sit-in" ont été organisés, des démarches engagées à tous les niveaux, mais aussi des veillées de prière.
King est très conscient que le mal et le péché n'ont pas qu'une dimension individuelle mais également collective. Aussi démontre-t-il qu'il faut résister à ces formes sociales et collectives du mal et du péché qui sont le racisme, le matérialisme, l'exploitation économique, la domination politique, le militarisme, et tout ce qui amoindrit la personnalité humaine (comme le sexisme dont on a pris conscience depuis la mort de King).
Des maux toujours actuels
Alors, en voyant cette liste - indicative mais non exhaustive est-ce que la théologie et la pratique de King sont d'actualité aujourd'hui ? Certainement !
Prenons simplement comme exemple le racisme. King écrit : "Le racisme est une foi, une forme d'idolâtrie". Son ultime logique, c'est le génocide, et par ailleurs cela peut signifier, avec une extrême arrogance que Dieu a commis une erreur de création. N'est-ce pas ce qui s'est produit au Rwanda ? Depuis le départ des colonisateurs belges, les Hutus ont maintenu un discours raciste contre la minorité tutsi, l'ancienne classe dirigeante. Nous savons maintenant que les Hutus avaient tout un programme pour tuer et éliminer les Tutsis. Encore un génocide qui a marqué notre siècle... Il faudra des générations et des générations pour guérir les blessures.
Et en France ? Il existe une loi interdisant les discours racistes et l'incitation à la haine en public. C'est une bonne chose ! Mais cela n'empêche pas de constater une xénophobie montante avec des dérapages racistes. Et on peut même voir un parti politique inciter à la xénophobie et jouer avec elle.
Et dans nos Eglises ? Nous sommes des communautés de la nouvelle humanité en Christ, n'est-ce pas ? Et pourtant, des chrétiens changent d'Eglise pour des raisons racistes... Nous sommes loin de vivre la réalité évoquée en Galates 3. 28 selon laquelle il n'y a plus, dans nos communautés, de barrières de race, de classe ou de sexe !
Peut-être le message de Martin Luther King pourrait-il nous aider à y arriver !
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