Agressions sexuelles et secrets douloureux
12. Agression sexuelle : Pourquoi les victimes ne parlent pas.
Type : Dossier
Thème : Abus et Harcèlement
Source : Jean-Louis Lafont
Publié sur Lueur le
- Agressions sexuelles et secrets douloureux
- Les sans voix
- Secrets et silence sont facteurs de séquelles
- Une écoute qui délivre
- De la compassion, à l'action
- Plusieurs éléments sont guérissants
- Agressions et abus : Quelques définitions légales
- Le consentement
- Agressions sexuelles : exemples de prévention (1)
- Agressions sexuelles : Exemples de prévention (2)
- Qui n'a pas de secret douloureux
- Agression sexuelle : Pourquoi les victimes ne parlent pas.
Sidération, dissociation, emprise
On pense qu’une victime de violence, enfant, ado ou adulte peut facilement quitter la maison, son conjoint, et porter plainte. C'est faux. Quand on voit le nombre de femmes (et d'enfants) tués par le conjoint au moment des séparations nous avons la réponse. Partir et parler est parfois très dangereux, et demande du soutien.
En cas de viol et d'agressions sexuelles les soupçons se multiplient du genre "Pourquoi est elle restée ?", "A sa place j'aurais dit non, crié, frappé, etc." Dans ces situations-là, il est impossible de réagir normalement. La victime est souvent sidérée, tétanisée et ne peut donc ni crier, ni parler. Regardons ce qui se passe dans le cerveau pendant un viol :
- La sidération paralyse la victime et l’empêche de réagir, de crier, de fuir. Pour cette raison beaucoup pensent à tort qu’elle est consentante "Pourquoi ne s'est elle pas défendue ?" Elle ne le peut pas ! Elle se sent coupable de ne pas s'être débattue, de n'avoir pu réagir, d'avoir été paralysée. Elle s'accuse toute seule. Faudrait-il, pour enlever tout soupçon de consentement, qu’elle soit grièvement blessée ou morte ?
- La dissociation. L'état de stress extrême du viol pourrait entrainer la mort. Mais le cerveau va faire disjoncter le système. La personne survit mais elle est déconnectée (sentiment d'être spectateur de la scène). Cette dissociation s’installera de façon continue si la victime reste en contact avec l’agresseur. Dans ce cas elle déconnecte de ses émotions et se transforme en un automate que l’agresseur peut contrôler. C'est la raison pour laquelle elle ne part pas. Elle est sous emprise.
Les victimes, jeunes ou pas se sentent coupables, honteuses et pensent avec raison que personne ne les croira. Dans une société de déni du viol beaucoup disent "Et si ce n’était pas un viol ?", "Peut-être bien qu'elle l'a cherché" etc. Il faut comprendre que la sidération, la dissociation, l'emprise, les troubles de la mémoire, la peur de ne pas être crue, empêchent la victime de dénoncer ce crime.
"Dans un monde à l’endroit, les femmes victimes de violences conjugales devraient être immédiatement protégées quand elles appellent à l’aide. Dans notre réalité́, c’est très loin d’être le cas. Il est rare que les menaces de mort soient prises au sérieux, et que leur sécurité́ soit réellement assurée, même si des mesures de protection plus efficaces existent depuis 2010, comme l’ordonnance de protection et le téléphone grand danger. De plus, après la séparation, il est fréquent que les conjoints violents utilisent les enfants pour continuer à exercer des violences lors de l’exercice de leur autorité́ parentale et de leurs droits de visite. Si les enfants quand ils sont directement menacés peuvent donner aux femmes victimes la force de porter plainte et de partir pour les protéger, ils peuvent être, a contrario, une raison majeure de ne pas dénoncer les violences par peur d’en perdre leur garde en cas de séparation. Et en raison des risques que les enfants pourraient courir en étant seuls avec leur père violent, si les droits de garde de ce dernier sont maintenus." Dr Murielle Salmona.
Dans les faits, les enfants, les ados et les femmes, ne peuvent pas se protéger ni fuir sans aide extérieure. C'est impossible car leur vie matérielle également est sous contrôle, pas d’argent, pas de travail et parfois pas de papiers. Cela nous lance un grand défi de solidarité à relever pour les aider. A chacun de nous de faire comprendre ces notions de sidération, de dissociation et d'emprise qui expliquent bien des comportements.
La rue ou les transports publics témoignent que les victimes ne peuvent faire face à ces attaques. Dans leur détresse elles sont tétanisées et ne peuvent demander de l'aide qui devrait venir de l'entourage immédiat. Comment expliquer ce silence, ce manque d'aide et de protection des gens autour qui se détournent et regardent ailleurs. Chacun de nous pourrait selon ses moyens, trouver quelque chose à faire pour aider, au moins appeler la police.
Je vous laisse avec ce poème de Martin Niemöller "Silence on tue"
"Quand ils sont venus chercher les communistes,
Je n'ai rien dit, Je n'étais pas communiste.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes,
Je n'ai rien dit, Je n'étais pas syndicaliste.
Quand ils sont venus chercher les juifs,
Je n'ai pas protesté, Je n'étais pas juif.
Quand ils sont venus chercher les catholiques,
Je n'ai pas protesté, Je n'étais pas catholique.
Puis ils sont venus me chercher, Et il ne restait personne pour protester."
Martin Niemöller (décédé en 1984) était un pasteur allemand. Il écrit le poème suivant à propos du régime hitlérien. Arrêté en 1937, il est interné en camp de concentration, libéré en 1945.
La valeur essentielle chez les Romains était la cruauté et dans ce contexte-là, Jésus n’a pas amené la force comme réponse, mais la douceur et l’amour. C’est une pensée toujours révolutionnaire que de prendre soin des plus faibles, des plus fragiles. Les "Romains" sous une autre forme sont toujours là, la cruauté aussi. Pour finir voici ma définition pour favoriser de bonnes relations entre les hommes, avec ça tout est possible, surtout le meilleur :
Philippiens 2:4 Cherchez l'intérêt de l'autre
© Jean-Louis Lafont
Thérapeute, conférencier, auteur du livre "Agressions sexuelles et secrets douloureux" lire l'intro et commander sur www.jeanlouislafont.com - Esaïe 61:1-4
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